En ce début d’année, on s’accroche à nos résolutions pour amortir nos ambitions sur les 11 prochains mois. Un exercice générique qui passe souvent par une rétrospective de nos comportements de la dernière année. Vos exploits et mauvais coups vous concernent, mais plusieurs mutations nous affectent collectivement. Qu’elles soient technologiques, politiques ou économiques, de nombreux grands changements nous ont déjà dépassés. Pour ma part et mes collègues qui évoluent dans l’univers des médias, les règles ont changé depuis un bon moment déjà.
Les diffuseurs de contenus traditionnels ne sont plus au premier plan pour servir de référence en matière d’information, car la démocratisation des plateformes numériques donne la chance à tous. En moins d’une décennie, le rôle des relations humaines a été déclassé par les relations numériques. On aime, on partage et on réagit à tous nos contacts, mais on ne parle plus à nos voisins.
Le modèle classique de communication ne tient plus la route, car la rétroaction du récepteur prime sur le message et sur la proximité qui existe avec l’émetteur. Dans cette roue de transmission du savoir boosté aux stéroïdes, on s’active pour cacher nos faux déficits de connaissance et de divertissement. On veut tout savoir rapidement pour être pionnier de l’instant et complice de la tendance. Le buzz est éphémèrement trop rapide. L’effet d’une drogue qui drague notre conscience en permanence et qui disparaît avant que cela devienne sérieux. On aspire le contexte et on oublie l’essentiel. Le contenu. On baisse la garde, on élargit les mailles du filet de la vérité et on invite les fake news à alimenter nos discussions, car demain personne ne parlera de la vérité.
Vérité, vérité, vérité, vérité, vérité! Dites-les 5 fois devant le miroir et il ne se passera rien du tout. Non pas parce que cela n’invoque rien, mais ce n’est tout simplement pas important. Les esprits ont maintenant de quoi se rapprocher de leur but ultime. La réalité. Elle est augmentée et nous sommes tous connectés. Juste à l’aube d’être complètement artificiels et constamment branchés.
Avant de perdre le contrôle et d’être aspiré par nos appareils électroniques, il faut se rappeler que nous avons encore le pouvoir de créer, d’inventer et de dessiner les éléments qui forment ces fils de temps verticaux qui diffusent nos vies en direct. Nous sommes au cœur de la matrice de l’information et notre contenu est le carburant essentiel à la survie de l’écosystème du GAFAM. En peu de temps, nous sommes majoritairement devenus la classe ouvrière de ce système au capitalisme de données et nous travaillons à notre insu pour les géants du web. Parlez-en aux journalistes qui doivent écrire pour informer la population, mais aussi formater leurs textes pour graisser les têtes de moteurs de recherches.
On n’arrêtera pas le progrès, mais il faut quand même consulter le rétroviseur de cette locomotive du changement une fois de temps en temps. En rétrospective, on verra que nous avons traversé le carrefour de la télé-réalité et de l’égo portrait sans faire de STOP. Mais il faudra vite remettre les yeux sur l’autoroute digitale avant de foncer tout droit dans le mur du futur.
À vos contenus!